Le droit à la compensation

5 clefs pour proposer un parcours de formation accessible à tous, dans le respect du droit à la compensation

En tant qu’organisme de formation ou centre de formation d’apprentis, vous devez mettre en place des actions concrètes, pour être en mesure d’accorder le même traitement à tous vos apprenants, qu’ils soient en situation de handicap ou pas, en accord avec vos valeurs et obligations légales.

Vous êtes donc amenés à vous interroger sur l’accessibilité pour tous de votre structure et de votre formation ; à repérer d’éventuelles difficultés d’apprentissage et à proposer, si nécessaires, des solutions pour compenser la situation de handicap. En tant que Référent Handicap Formation, il est de votre rôle d’assurer ces missions et la RHF est là pour vous appuyer, plus particulièrement dans la sécurisation de vos parcours de formation.

Comment mettre en œuvre les moyens de compensation nécessaires ? Et le droit à la compensation du handicap : qu’est-ce que cela signifie ? Réponses en 5 points.

1. Que dit la Loi de 2005 et plus généralement dans quel cadre juridique évoluent les Organismes de Formation et Centres de Formation des Apprentis ?

La Loi du 11 février 2005, dite Loi pour l’Egalité des Droits et des Chances, la Participation et la Citoyenneté des personnes handicapées, pose l’obligation de solidarité de la société à l’égard des personnes en situation de handicap.
Selon, l’article L114, « constitue un handicap, au sens de la présente loi, toute limitation d’activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d’une altération substantielle, durable ou définitive d’une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d’un polyhandicap ou d’un trouble de santé invalidant. »

 

On passe alors d’un modèle individuel dans lequel le handicap est le problème de la personne, à un modèle social, dans lequel le handicap est une affaire collective, citoyenne, et où la responsabilité sociale de chacun est engagée.

L’ensemble de la société a le devoir de développer son accessibilité « pour tous » alors que les personnes handicapées bénéficient d’un droit à la compensation des conséquences du handicap, quels que soient l’origine et la nature de la déficience, l’âge ou le mode de vie de la personne en situation de handicap, dû par la collectivité.

La loi de 2005 repositionne le Handicap comme une interaction entre une personne qui connaît des limitations et son environnement et pose le droit à compensation et donc à bénéficier d’aménagement en formation.

Il s’agit de garantir la plus grande autonomie possible de la personne en situation de handicap ; de répondre à ses aspirations et à ses besoins et de respecter son projet de vie.

 

Le décret n°2006-26 du 9 janvier 2006 vise plus spécifiquement les Organismes de Formation et Centres de Formation des Apprentis.

Les structures de formation doivent désormais être accessibles, c’est-à-dire mettre en œuvre l’ensemble des moyens matériels et humains pour permettre aux personnes en situation de handicap de bénéficier pleinement d’une action de formation.

Elles doivent également prendre en compte les difficultés rencontrées et proposer de manière individuelle les solutions de compensation nécessaires, à toutes les étapes du parcours de formation (l’accès ; le temps de formation ; les examens).

 

Il peut s’agir par exemple de proposer un accueil à temps partiel, d’adapter la durée de formation au handicap ; de mettre à disposition du matériel spécifique comme des bureaux mobiles et inclinables ; rendre accessibles les supports et le matériel pédagogique ; recourir aux nouvelles technologies numériques ; d’aménager les modalités d’évaluation ; d’être accompagné par une aide humaine, comme un traducteur en langue des signes, lors des phases d’examen…

 

La Loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel, avec notamment la création de la certification Qualiopi érige un nouveau référentiel en matière de qualité des formations professionnelles et renforce les obligations vis-à-vis des attentes des apprenants en situation de handicap.

Ne pas prendre en compte cette nouvelle mesure applicable depuis janvier 2022 et les besoins particuliers liés au handicap peut constituer une discrimination.

2. Accessibilité des Organismes de Formation / Compensation du handicap en formation : ce qu’il faut comprendre

Aujourd’hui, tout centre de formation a l’obligation de s’interroger sur l’accessibilité de sa structure et de ses cours, sur le rythme de la formation et les difficultés d’apprentissage liées aux différentes typologies de handicap qui peuvent éventuellement concerner des apprenants, pour répondre à ses obligations légales.

L’accessibilité consiste à proposer des solutions d’aménagement pour toutes les personnes, quel que soit leur handicap, dans tous les établissements recevant du public, même s’ils n’accueillent pas spécifiquement des personnes en situation de handicap.

On pense par exemple à l’accès physique aux locaux de formation avec l’installation d’un ascenseur ; la mise à disposition d’informations claires sur les modalités de formation et d’évaluation adaptées au handicap ; l’envoi systématique des supports de formation en amont du cours à tous les participants…

Augmenter son accessibilité permet de réduire les besoins en compensation.

La Compensation est une réponse individuelle aux besoins bien spécifiques d’une personne dans une situation précise. Le Centre de Formation qui accueille cette personne va lui proposer des solutions de compensation nécessaires au bon déroulement de la formation. Apporter des réponses adaptées et individualisées permet de supprimer les obstacles ou de réduire les inégalités de chance produites par les éventuelles conséquences du handicap.

3. Quels sont les Acteurs-clefs de la mise en place de la Compensation ?

Si la compensation est une démarche individuelle et personnalisée, la recherche de solutions est, elle, collective.

La loi impose aux organismes de formation et aux centres de formation des apprentis de tenir compte des besoins particuliers des personnes en situation de handicap en adaptant les formations proposées. Mais comment identifier ces besoins… ?

 

La personne en situation de handicap connait ses difficultés et a peut-être déjà bénéficié d’adaptations ou mis en place par elle-même, des techniques de compensation.

Mais l’acteur-clef de la mise en place de la compensation en formation est le référent handicap. Il a pour mission de repérer les écarts éventuels entre les possibilités de l’apprenant et les conditions de réalisation de la formation ; d’identifier les difficultés d’apprentissage ; d’évaluer les besoins ; de proposer des solutions, élaborées avec la collaboration de l’équipe pédagogique notamment pour compenser le handicap ; de financer si besoin leurs aménagements et les mettre en place.

 

Il peut bénéficier pour la réalisation de cette mission de l’accompagnement de la RHF.

La RHF pourra l’aider à repérer les acteurs à mobiliser pour analyser la situation du bénéficiaire, identifier les solutions de compensation possibles et dispositifs mobilisables.

 

L’Agefiph déploie et finance des dispositifs permettant de prendre en charge la compensation ; elle participe également au financement des solutions et si depuis 2021 les OPCO financent dans le cadre de contrat d’apprentissage les besoins en compensation à hauteur de 4000€, l’Agefiph peut intervenir en complément.

 

Le référent de parcours peut également être sollicité car il peut détenir des informations qu’il serait important de prendre en compte pour adapter la formation.

4. Comment procéder à l’évaluation des besoins ?

Le Référent Handicap Formation est l’interlocuteur central pour repérer les éventuelles difficultés d’apprentissage d’apprenants en situation de handicap ; il peut en être informé par les formateurs ou être directement sollicité par l’apprenant lui-même. Mais il est essentiel de distinguer l’état de santé de ses conséquences. L’état de santé de l’apprenant relève exclusivement du secret médical et la personne n’a aucune obligation d’en tenir informé le référent ; tout comme le référent n’a pas à demander explicitement à l’apprenant son handicap.

D’où l’importance pour les RH de signaler leur présence au sein de l’établissement et d’être sensibilisé à l’identification des typologies de handicap et leurs conséquences sur le parcours de formation.

Il est également essentiel de prendre le temps de préparer le rendez-vous d’évaluation des besoins de l’apprenant. Vous pouvez aussi solliciter la collaboration d’autres acteurs, qui pourront par exemple vous renseigner sur le parcours de l’apprenant et sur la formation qu’il va suivre.

Pour identifier les impacts d’une situation de handicap, voici 4 questions qui peuvent être discutées avec la personne :

  • La personne peut-elle faire tout ce qui lui est demandé ? (Comprendre et exécuter la tâche demandée ; rédiger une fiche ; exposer une problématique ; participer aux temps collectifs, à la vie de l’entreprise…)
  • La personne peut-elle le faire dans toutes les situations ? (En situation de travail et en formation ; pour les évaluations mais également dans les temps de pause ou de déjeuner avec les collègues…)
  • Au rythme et dans les temps attendus ?
  • D’où elle vient, la personne peut-elle se rendre facilement là où elle veut aller ?

Il est important également d’identifier les forces et compétences de l’apprenant.

La personne en situation de handicap est toujours au cœur de l’évaluation.

 Il est temps ensuite pour le Référent Handicap de remplir la grille d’évaluation des besoins de l’apprenant en situation de handicap. Cet outil est le fruit de la collaboration entre l’Etat et l’Agefiph. Ce n’est pas uniquement un guide de suivi. C’est avant tout un outil méthodologique qui permet au référent handicap d’analyser la situation, d’identifier les besoins et les solutions et de produire un plan individualisé d’aménagement. Les éléments repérés permettent d’objectiver les besoins et de solliciter les financements adéquats si besoin. La personne en situation de handicap bénéficie alors des mêmes droits et chance que l’ensemble de ses pairs.

L’idéal est de procéder à cette évaluation le plus tôt possible, dès l’entrée en formation, même en amont quand cela est possible. Votre conseiller RHF peut vous conseiller et vous accompagner dans cette évaluation.

Pour tout savoir sur la grille d’évaluation des besoins de l’apprenant en situation de handicap (LIEN VIDEO AGEFIPH)

5. Les différents types de compensation et comment les mobiliser ?

Les types de compensation

 

La compensation se définit donc comme l’ensemble des adaptations proposées pour réduire les conséquences du handicap d’un apprenant dans une situation précise.

A chaque apprenant, sa situation et donc sa propre compensation.

 

On identifie 4 types de compensation :

 

  • Les compensations organisationnelles : il s’agit de mesures concernant par exemple les horaires de la formation, la mise en place des différentes tâches dans le travail, le fonctionnement en télétravail…
  • Les compensations pédagogiques : il s’agit d’adaptation des modalités de la formation (nouveaux supports et formats pédagogiques, transmissions des supports de formation avant le cours, alternance des méthodes d’apprentissage…)
  • Les compensations techniques : il s’agit des moyens matériels mis en place comme l’adaptation physique du poste de formation, l’usage d’un logiciel de retranscription vocale ou d’une plage braille par exemple.
  • Les compensations humaines : il s’agit de recourir à des experts qualifiés, comme un traducteur en langue des signes, un auxiliaire de vie, un secrétaire scripteur ou simplement sensibiliser l’équipe pédagogique et les stagiaires sur les adaptations à mettre en place.

Avec la mise en place d’une politique d’accessibilité, l’accompagnement de la RHF, la mobilisation en interne des principaux acteurs (équipe pédagogique notamment), des solutions de compensation et des aménagements simples peuvent émerger rapidement et facilement sans aide extérieure.

 

Les dispositifs et aides

 

> En concertation avec un prescripteur, une  une P.A.S : Prestation d’Appuis Spécifiques pourrait être mobilisée.  Un prestataire apporte son expertise sur la typologie de handicap pour identifier au regard du projet professionnel de la personne, les moyens de le compenser.

La P.A.S s’adresse à toute personne disposant d’une reconnaissance administrative du handicap ou en cours de reconnaissance ; concerne les 6 types de handicap (Moteur, Auditif, Visuel, Mental, Psychique, Cognitif) et est délivrée exclusivement sur prescription du conseiller à l’emploi (Cap Emploi, Pôle Emploi ou Mission Locale…).

 

Les PAS se déclinent pour chaque type de handicap en 5 prestations :

  • Pré diagnostic : identifier le handicap prégnant et orienter vers la bonne prestation
  • Bilan complémentaire / situation de la personne (hors projet professionnel)
  • Appui expert sur le projet professionnel

  • Appui expert à la réalisation du projet professionnel
  • Appui expert pour prévenir et/ou résoudre les situations de rupture

>Le Référent Handicap peut également mobiliser la Plateforme de prêt de matériel, pour les apprenants inscrits dans un cursus de formation professionnelle (statut apprenti ou stagiaire de formation), bénéficiaire de l’obligation d’emploi.

L’OF ou le CFA sollicite l’intervention de la plateforme de prêt auprès d’Avenir Pro, qui l’accompagne dans la constitution de la demande et l’instruction de la demande de prise en charge.

Une convention de mise à disposition de matériel est alors établie, après accord du comité décisionnel. Un suivi est effectué pour vérifier que le matériel convient aux besoins et pour anticiper une poursuite de parcours

>L’aide à l’adaptation des situations de formation : 2ASF

L’aide se situe dans un « cadre d’aménagement raisonnable » et peut financer des surcoûts liés à la stricte compensation du handicap, en complément des aides et dispositifs de droit commun, des obligations d’accessibilité des OF et CFA et des cofinancements sollicités ou obtenus.
Pour les apprentis qui bénéficient de la RQTH, l’Agefiph intervient au-delà du financement prévu par les OPCO qui est de 4000€ maximum.

La CIDPH (Convention internationale des droits des personnes handicapées) définit l’aménagement raisonnable comme « les modifications et ajustements nécessaires et appropriées n’imposant pas de charge disproportionnée ou indue, apportés, en fonction des besoins dans une situation donnée, pour assurer aux personnes handicapées la jouissance ou l’exercice, sur la base de l’égalité avec les autres, de tous les droits de l’homme et de toutes les libertés fondamentales. »

Pour approfondir

Vous souhaitez en savoir plus ? Vous avez besoin d’appui sur la mobilisation de cette aide et plus généralement sur la mise en place de solutions de compensation, la RHF vous accompagne sur l’appui aux situations individuelles.